La cuisine des onsen

Onsen tamago et autres spécialités

Découvrir la cuisine des onsen est une expérience à la fois sensorielle et culturelle. Dans certaines villes thermales du Japon, c’est en effet tout un art de vivre qui s’est développé autour des sources chaudes et de leurs vertus. Et il n’est pas seulement question de baignade. Je vous ai sélectionné sur cette page cinq destinations thermales qui brillent par leur tradition culinaire.

Au pied du mont Yufu, Beppu baigne dans les fumerolles et les odeurs de soufre. Ici est née, durant l’époque Edo, la cuisine jigoku mushi qui exploite la vapeur des sources chaudes. Une excellente manière de tirer partie de la puissance géothermique de cette région volcanique très active.

Le quartier de Kannawa Onsen est le lieu idéal pour s’initier à cette cuisine des onsen, dont les propriétés sont multiples :

  • grâce à une cuisson rapide, les aliments conservent leur couleur et leurs qualités nutritionnelles
  • la vapeur, riche en chlorure de sodium, apporte une légère saveur salée
  • aucune matière grasse n’est nécessaire
  • l’impact sur l’environnement est quasi-nul, les fours ne consommant pas d’autre énergie que celle issue des entrailles de la terre

Jigoku mushi kôbô, la cuisine des enfers

Non loin des enfers de Beppu, Jigoku mushi kôbô est une institution de Kannawa. L’endroit tout entier baigne dans les vapeurs de cuisson. Celles-ci émanent des fours en brique du restaurant, que chacun peut louer à sa guise pour faire cuire des aliments. Les mets sont vendus sur place, mais il est également possible de ramener ses propres produits. Chaque plat est alors déposé dans une grande passoire ou un panier en bois, eux-mêmes placés dans un four en pierre jigoku mushi kama. Les vapeurs qui s’en échappent font plus de 100°C.

Muni de gants en caoutchouc, le visiteur recouvre le tout avec un grand couvercle en bois. Un minuteur permet de surveiller le temps de cuisson de chaque plat, qui oscille généralement entre cinq et dix minutes. Légumes, riz enveloppé dans une feuille de bambou, œufs, viande, poisson ou fruits de mer… On peut faire cuire toutes sortes de produits dans les fours de Jigoku mushi kôbô. Après le repas, chaque client fait sa propre vaisselle.

Très populaire, l’établissement est aujourd’hui la vitrine de la cuisine des onsen à Beppu. Au point d’être parfois victime de son succès.

De Kannawa à Myôban

Heureusement, la cuisine jigoku mushi peut être expérimentée ailleurs à Kannawa. En flânant dans les rues du quartier, il n’est pas rare de croiser quelques stands proposant épis de maïs, patates douces fondantes ou œufs durs à déguster sur le pouce. Certains bains publics invitent également leur clientèle à tenter l’expérience. C’est le cas du bain de Hyotan Onsen par exemple, qui possède ses propres fours. 

Le quartier de Myôban abrite quant à lui le petit salon de thé Okamotoya. L’endroit est réputé pour sa spécialité, le jigoku mushi pudding. Il s’agit d’une crème caramel cuite à la vapeur des enfers, à la texture sublime. Commercialisé sur place depuis 1988, son succès ne s’est jamais démenti. Au point que certains voyageurs viennent s’égarer à Myôban dans l’unique but d’y goûter !

Les onsen tamago, enfin, se dégustent un peu partout, notamment du côté d’Umi Jigoku. Un panier rempli d’œufs est d’ailleurs constamment immergé dans l’Enfer de la Mer, au bout d’une longue et solide perche en bambou. 

Il faut dire qu’avec une eau à 98°C, Umi Jigoku est un peu une « marmite géante ». Il serait dommage de ne pas l’exploiter…

Autre destination majeure des amateurs de cuisine des onsen, la station thermale de Kusatsu Onsen est réputée pour ses bains autant que pour sa cuisine.

Autour de la place occupée par Yubatake et dans la rue commerçante menant au parc Sainokawara, quelques restaurants et confiseries permettent de s’initier aux saveurs locales. On peut notamment y déguster :

  • des manju (gâteaux fourrés)
  • des crèmes aux œufs ou purin (pudding) cuites à la vapeur
  • des nouilles larges himokawa udon ou des kusatsumi udon
  • des onsen tamago (œufs cuits dans les sources chaudes)

Les secrets de cuisson de l’onsen tamago

L’eau thermale n’atteignant pas le point d’ébullition, l’onsen tamago cuit plus lentement qu’un œuf dur traditionnel, ce que certains considèrent comme une forme de cuisson « basse température ». Il est donc tout à fait possible de dénicher des recettes à reproduire chez soi sur Internet, en s’inspirant de ce principe. Ainsi, une variante de l’onsen tamago, baptisée « œuf parfait », séduit particulièrement les chefs français depuis quelques années. Cuit très précisément à 63,2°C pendant 45 minutes, l’œuf parfait aurait une texture idéale, entre blanc « soyeux » et jaune « crémeux ».

L’onsen tamago est un classique de la street food nipponne, que l’on croise aussi fréquemment à la table du petit-déjeuner traditionnel japonais. Mais s’il y a un endroit où sa consommation revêt une dimension un peu différente, c’est bien la vallée d’Owakudani, sur les flancs du mont Hakone.

Owakudani (litt. « grande vallée bouillonnante ») est une véritable cocotte-minute, d’où jaillissent en permanence d’impressionnants fumerolles. Comme le mont Aso, l’endroit est étroitement surveillé par les autorités. Celles-ci n’hésitent pas à en restreindre l’accès lorsque l’activité volcanique s’intensifie un peu trop.

Si je vous parle d’Owakudani, c’est que l’endroit est très réputé pour ses œufs noirs (kuro tamago). Une légende locale (que je qualifierais plutôt d’habile coup marketing) prétend que manger l’un de ces œufs prolongerait l’espérance de vie de 7 ans.

La teinte noire, quant à elle, est liée à la présence de soufre et de fer dans l’eau de cuisson. Ces deux éléments réagissent au contact du calcium présent dans la coquille, pour lui donner cette teinte spécifique… qui ne modifie en rien son goût ni son aspect intérieur.

Un autre exemple de cette utilisation de la force géothermique se trouve à Yumura onsen. Haut lieu de la gastronomie locale, Arayu est une place abritant une source chaude publique, utilisée pour cuisiner librement au quotidien. À proximité, on peut d’ailleurs acheter des filets remplis de divers ingrédients, à tremper dans la source.

C’est à Yumura onsen que j’ai goûté mes premiers onsen tamago. Et je garde un souvenir très marquant de l’expérience en elle-même. Je vous recommande également de tenter l’expérience du caramel Arayu, qui s’obtient en faisant tremper une conserve de lait concentré dans la source pendant 6h. Un vrai délice.

Unzen

Dernière escale de notre périple, Unzen est une autre ville célèbre pour ses enfers. Ici, leur accès est totalement gratuit. Sans surprise, on y trouve encore une fois un petit stand commercialisant des onsen tamago.

L’eau provenant de la source thermale d’Unzen entre également dans la composition d’une friandise locale appelée Yusempei. Il s’agit d’une gaufrette fine et croustillante fabriquée à la main. Si vous vous rendez sur place, ne manquez pas également la limonade d’Unzen au charmant packaging rétro.