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Kokeshi et poupées japonaises

Un artisanat traditionnel aux multiples visages

L’univers des kokeshi est riche et complexe, de quoi passionner les collectionneurs de beaux objets traditionnels. Pour vous en parler, j’ai donc fait appel à une spécialiste du sujet, Laëtitia Hébert, qui partage sa passion sur le site web folkeshi.com et dont je vous recommande également le travail sur Instagram. C’est toujours un plaisir de voir passer dans mon fil d’actualité l’une de ses jolies photos, qui valorisent avec amour et simplicité l’esthétique inimitable des poupées japonaises.

Il existe toutes sortes de poupées au Japon, il est donc important de bien reconnaître les caractéristiques des kokeshi pour ne pas vous tromper.

La star des poupées artisanales en bois

Le terme kokeshi désigne de petites poupées en bois artisanales, peintes à la main, apparues dans le Tohoku (au nord du Japon). Leur naissance daterait du début du 19e siècle, une période qui correspond à la fin de l’époque Edo. D’abord utilisées comme jouets par les petites filles, les kokeshi deviennent rapidement des souvenirs très prisés. La région du Tohoku abrite en effet de très nombreuses stations thermales, où se concentre la plupart des ateliers de fabrication. On peut citer, par exemple, Naruko ou Zao onsen.

Cet engouement s’accroît particulièrement après la Seconde Guerre mondiale, si bien qu’elle inspire d’autres régions. Ces dernières développent leur propre production, dans un style très différent. Aujourd’hui, on trouve donc sur le marché nippon deux grands types de kokeshi. Les « traditionnelles » du Tohoku sont fabriquées par des artisans tourneurs sur bois et n’ont pas de membres. Les « créatives », quant à elles, sont souvent vêtues de kimono et viennent d’un peu partout au Japon.

Où les kokeshi artisanales sont-elles fabriquées ?

Pour répondre à cette question, je laisse la parole à Laëtitia Hébert. « Les kokeshi sont produites dans l’atelier de l’artisan. Parfois un atelier-boutique, comme on en voit beaucoup à Naruko Onsen par exemple, mais le plus souvent dans un appentis dédié, proche de la maison de l’artisan. »

Comment procède l’artisanat pour créer une kokeshi ?

« Le bois est séché (plusieurs années), puis débité en segments plus propres à être travaillés. L’artisan sculpte ensuite la kokeshi (en une ou deux parties) sur le tour à bois, et ponce le bois à l’extrême, pour obtenir une surface très lisse, sur laquelle le pinceau glissera facilement.

Les parties (tête et corps) sont ensuite peintes, à l’aide du tour pour le travail de rayures ou de disques, ou à main libre pour le visage, les fleurs etc. On replace généralement la kokeshi sur le tour pour passer de la cire sur les couleurs (cela leur donne un aspect légèrement brillant), puis la poupée est assemblée, et signée. La plupart des artisans traditionnels exerce encore dans le Tohoku, la grande région qui rassemble les préfectures de Fukushima, Miyagi, Akita, Yamagata, Iwate et Aomori.

Les artisans créatifs ont un processus de création assez proche mais travaillent plus volontiers la texture, sculptent une partie de la poupée à la main. Ils sont disséminés à travers tout le Japon, jusqu’à Okinawa, mais plus particulièrement dans la préfecture de Gunma. »

Les 12 styles de kokeshi traditionnels

On peut officiellement classer les kokeshi traditionnelles en 12 styles, correspondant à leurs lieux de fabrication originels. Évidemment, ce classement ne correspond plus réellement à la réalité géographique actuelle. Au fil du temps, certains artisans ont, en effet, déplacé leurs ateliers ou transmis leur savoir-faire à d’autres créateurs à travers le Tohoku. 

Kijiyama

Yuzawa Onsen
(Akita)

Tsugaru

Kuroishi
(Aomori)

Nakanosawa

Inawashiro
(Fukushima)

Tsuchiyu

Tsuchiyu Onsen
(Fukushima)

Nanbu

Hanamaki
(Iwate)

Naruko

Naruko Onsen
(Miyagi)

Sakunami

Sakunami Onsen
(Miyagi)

Togatta

Togatta onsen
(Miyagi)

Yajiro

Shiroishi
(Miyagi)

Hijiori

Hijiori Onsen
(Yamagata)

Yamagata

Yamagata-shi
(Yamagata)

Zao-Takayu

Zao Onsen
(Yamagata)

Le nom de ces 12 styles de kokeshi correspond généralement à celui du lieu d’où elles proviennent. On remarque qu’il s’agit bien souvent de stations thermales, où il était sans doute plus simple pour un artisan de vendre sa production aux voyageurs.

Les kokeshi créatives

Plus connues dans nos contrées, les kokeshi créatives (ou sosaku kokeshi) sont aussi les plus répandues au Japon. Elles portent bien souvent de jolis kimonos colorés et offrent une grande variété de motifs, de postures et de formes.

Elles peuvent être sculptées d’un bloc ou en plusieurs parties, et ont parfois même une tête mobile, qui se balance de gauche à droite. Certaines conservent un corps cylindrique qui les rapproche esthétiquement de leurs cousines du Tohoku. Leurs coiffures sont cependant plus élaborées.

On trouve des kokeshi un peu partout au Japon, mais sont-elles toutes des kokeshi artisanales ?

« J’aurais tendance à dire oui », explique Laëtitia Hébert. « D’une part : toutes les kokeshi sont artisanales, sinon, ce ne sont pas des kokeshi. Elles sont également toutes (absolument toutes) en bois. Si ce n’est pas du bois, vous vous trouvez devant une poupée produite par une compagnie, souvent étrangère, tirant partie de la popularité des kokeshi. La contrefaçon n’est pas présente de façon flagrante sur le sol japonais. »

Vous souhaitez démarrer votre propre collection de kokeshiVoici quelques conseils pour vous lancer…

Où acheter des kokeshi en ligne ?

Le site francophone de référence pour découvrir les kokeshi est bien évidemment celui de Laëtitia Hébert, Folkeshi

On peut s’y procurer de magnifiques poupées réalisées par des artisans certifiés, dans le respect du savoir-faire traditionnel nippon. La boutique Folkeshi propose également des créations originales inspirées par les kokeshi, ainsi que de jolis produits dérivés (cartes postales, livres, petites broches, etc.). Le blog, quant à lui, dispense plein de conseils utiles pour les collectionneurs en herbe.

Vous ne trouvez pas votre bonheur sur ces sites, ou cherchez comment vous procurer des kokeshi directement au Japon ? Le proxy d’achat ZenMarket est une excellente option pour commander la poupée de vos rêves sur les sites de vente en ligne japonais, en particulier si ceux-ci ne proposent pas la livraison à l’international.

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Il arrive, enfin, que l’on croise des kokeshi en France, dans les boutiques, galeries ou salons dédiés au Japon. Dans tous les cas, assurez-vous que la poupée soit véritablement en bois, et qu’elle soit signée. C’est le meilleur indice garantissant son authenticité.

3 questions à Laëtitia Hébert, du site Folkeshi

Combien coûte une kokeshi artisanale au Japon ?

« Le prix des kokeshi traditionnelles est souvent compris entre 1500¥ et 5000¥ selon la taille et la complexité de la poupée. Certains artisans tiennent à proposer des petits prix, d’autres les montent plus, c’est variable et ce n’est pas « normé ». Les créatives sont volontiers plus chères. »

Comment bien choisir sa kokeshi et s’assurer qu’elle est de qualité ?

« Sauf si extrêmement ancienne (ce qui est vraiment très rare), toutes les kokeshi sont signées par l’artisan qui les a faites. La signature peut se trouver en-dessous ou sur le côté. Elle est réalisée à l’encre noire (jamais au stylo), ou pyrogravée pour les kokeshi créatives. Ou bien il y a un hanko, un tampon-signature de l’artiste (en noir ou en rouge).

Pour les poupées anciennes, une fissure ne se rattrape pas, un décor délavée ou marqué de tâche d’eau ne se nettoie pas, une peinture craquelée n’ira pas en s’améliorant. Le bois peut craquer lors du transport Japon-France, à cause du changement d’humidité ambiante. Cela n’arrive pas avec les kokeshi neuves, le bois récent est plus « souple ». La qualité est un ressenti personnel, lié à la technique d’un artiste. Tous les artisans traditionnels travaillent seuls d’un bout à l’autre – il arrive parfois que le bois soit tourné par un autre membre de la famille, lorsqu’ils se partagent un atelier.

Quant au choix, il faut à mon avis se fier à son propre goût. Peu importe que l’artisan soit recherché si vous n’aimez pas son style, c’est vous qui l’aurez devant les yeux tous les jours ! Chaque collectionneur construit sa sélection, grande ou petite, selon ses propres goûts. C’est ce qui est passionnant. »

Un dernier conseil pour celles et ceux qui souhaitent faire leur premier pas dans l’univers des kokeshi ?

« Mon principal conseil pour plonger dans cet univers pour la première fois serait de chercher à voir le plus d’images de kokeshi possible. C’est en observant la variété incroyable de ces poupées qu’on saisit mieux de quoi il retourne, et c’est à mon avis une étape importante avant de commencer à acquérir quelques poupées. Faites-vous l’œil, utilisez les tableaux Pinterest, Instagram, ou procurez-vous un livre sur le sujet (je trouve le mien est très bien 😀 mais je recommande tout autant ceux de Manami Okazaki, en anglais). Si vous êtes au Japon, allez voir un des musées consacrés aux kokeshi, ça vaut le détour ! »

Le livre de Laëtitia Hébert « Kokeshi, l’art des poupées japonaises » figure dans ma sélection d’ouvrage d’été 2022.

Les poupées japonaises ne se limitent pas aux kokeshi. Des automates mécaniques karakuri typiques de la préfecture d’Aichi aux poupées hina en porcelaine, exposées le 3 mars lors du festival Hina matsuri, il en existe de nombreuses sortes aux quatre coins de l’archipel.

Les effigies de daruma commercialisées dans certains temples et dans de nombreuses boutiques de souvenirs sont parmi les plus connues. Elles représentent Bodhidharma, un moine barbu à la mine sévère.

Dans la région de Hida en préfecture de Gifu, ce sont les poupées sarubobo qui font le bonheur des amateurs d’artisanat. Confectionnées en tissu, elles étaient originellement offertes aux petites filles en guise de talisman, afin de leur assurer le bonheur marital.

Lors de vos pérégrinations aux quatre coins de l’archipel, ne manquez pas de vous offrir ces trésors en guise de souvenir.